Aller au contenu

Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
LES RESSUSCITÉS

le ciel ne lui a pas refusé l’élément pour lequel il l’avait créée : elle a vu s’écouler dans une fête éternelle son éternelle jeunesse ; l’hommage lui faisait escorte, et le malheur ne s’est approché d’elle qu’à respectueuse distance.

Elles étaient trois sous le Directoire, trois femmes admirablement belles, les trois Grâces, selon les madrigaux du temps, — madame Tallien, Joséphine de Beauharnais et madame Récamier. — À elles trois, ces femmes ont affolé Paris et vu tomber les personnages les plus illustres à leurs pieds, ces beaux pieds qu’elles portaient nus et seulement chaussés de cothurnes, avec des émeraudes aux doigts. On les rencontrait en tous lieux, aux concerts où chantait Garat, aux bals ou dansait Trénitz, — ce pauvre Trénitz, mort fou à Charenton ! — Elles étaient l’âme du plaisir, et on les avait vues apparaître le lendemain de Thermidor, comme trois fleurs poussées tout à coup au bord d’un volcan éteint. Toutes les trois avaient leur mission politique ; elles régnaient et elles gouvernaient, de par la grâce d’elles-mêmes. Voici comment celle qui devait bientôt régner autrement et sous le nom