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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/164

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LES RESSUSCITÉS

On était venu à l’Institut bourgeoisement, les femmes en mantelet, les hommes en paletot. Plus de cravates blanches, plus de gants blancs. Ô décadence ! ô fin de toutes les traditions ! Jadis, dans cette enceinte, que d’épaules nues ! que de riches costumes officiels sous cette coupole ! que d’uniformes variés ! C’est là que j’ai pu voir, dans ma jeunesse, les dernières Muses du règne de Louis-Philippe, coiffées des derniers turbans et des derniers oiseaux de paradis, le cou ceint d’un long boa. Aujourd’hui il n’y a plus de Muses, il n’y a plus que de braves dames, habillées comme tout le monde et faisant partie de la Société des gens de lettres.

Après que les tambours eurent battu aux champs, M. Jules Janin fut introduit par ses deux parrains, soutenu par eux, car la goutte ne l’avait pas quitté. Cette ronde figure, éclairée par deux petits yeux fins, et encadrée encore par quelques mèches voltigeantes, produisit une impression singulière sur le public. Toute une époque réapparaissait, fatiguée, mais complète. On se tut pour l’écouter. Alexandre Dumas fils le guettait des yeux. Le duc d’Aumale attendait sa parole.