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LES RESSUSCITÉS

tableaux, des parodies, des caricatures, des éloges, des épigrammes. L’Europe entière en fut remuée. Voyageant plus tard en Turquie, à la porte d’une mosquée où il avait décliné son nom, Chateaubriand vit accourir vers lui, les bras ouverts, un musulman qui l’accueillit par cette exclamation : Ah ! ma chère René et cher Atala ! — Ce n’était pas correct, mais c’était flatteur.

Atala est restée au fond de notre jeunesse comme un souvenir charmant, mêlé aux choses les plus intimes du catholicisme et de l’amour, comme un lointain bruissement d’orgue. La génération actuelle l’a lu au sortir de sa première communion, sur le coin d’un forte-piano, alors que tout Paris allait admirer les tableaux de Gérard, après une revue passée par le général Molitor. Aujourd’hui, en tout temps, sous tous les points de vue, Atala demeure une fantaisie délicieuse, un roman-curiosité, plein de chatoiements bizarres, et qui, pour la fidélité locale du style, sinon pour l’attendrissement profond du sujet, laisse en arrière Paul et Virginie. Tel chapitre est colorié, criard et gracieux comme un plumage d’ara. C’est le premier roman travaillé de forme ;