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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/89

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CHATEAUBRIAND

que Lydie ou Camille, une nymphe quelconque, la première venue.

Entre son œuvre passée et son œuvre actuelle, entre les Martyrs et les Mémoires, je vois une grande différence.

L’œuvre passée de Chateaubriand, ensemble harmonieux, m’apparaît comme un palais de marbre au milieu d’une forêt. Tout y est enchantement et magnificence. Des voix mystérieuses résonnent au dedans, des parfums enivrants s’exhalent au dehors. Chaque fenêtre ouvre sur un horizon de feuillage brûlant, sur un parc profond et rempli de statues, sur un coteau qui ploie sous les pampres. C’est un très-beau palais. Seulement un cercle de grilles l’emprisonne, des sentinelles en défendent l’approche à plus d’une demi-lieue à la ronde, et, pour y pénétrer, il ne faut pas moins de sept ou huit quartiers de noblesse.

L’œuvre posthume de Chateaubriand, — c’est-à-dire les Mémoires, — offre bien encore, si l’on veut, l’aspect d’un palais ; mais déjà ce n’est plus du marbre, c’est bel et bonnement de la pierre. La splendeur froide de l’architecture grecque a fait place à l’épa-