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DISCOURS

encore en vain que l’on iroit chercher du secours chez les anciens, aussi malheureux sans doute dans leurs hypothèses que les poëtes dans leurs fictions, qui attribuèrent l’effet de l’écho aux malheurs d’une nymphe causeuse, que Junon irritée changea en voix, pour avoir amusé sa jalousie, et par la longueur de ses contes (artifice de tous les temps), l’avoir empêchée de surprendre Jupiter dans les bras de ses maîtresses.

Tous les philosophes conviennent généralement que la cause de l’écho doit être attribuée à la réflexion des sons, ou de cet air qui, frappé par le corps sonore, va ébranler l’organe de l’ouïe ; mais s’ils conviennent en ce point, on peut dire qu’ils ne vont pas longtemps de compagnie, que les détails gâtent tout, et qu’ils s’accordent bien moins dans les choses qu’ils entendent, que dans celles qu’ils n’entendent pas.

Et premièrement, si, cherchant la nature du son direct, on leur demande de quelle manière l’air est poussé par le corps sonore, les uns diront que c’est par un mouvement d’ondulation, et ne manqueront pas d’alléguer l’analogie de ces ondes avec celles qui sont produites dans l’eau par une pierre qu’on y jette ; mais les autres, à qui cette comparaison paroît suspecte, commenceront dès ce moment à faire secte à part ; et on les feroit plutôt renoncer au titre de philosophe que de leur faire passer l’existence de ces ondes dans un corps fluide, tel que l’air, qui ne fait point, comme l’eau, une surface plane et étendue sur un fond ; sans compter que, dans ce système, on devroit, disent-ils, entendre plusieurs fois le même coup de cloche, puisque la même impression forme plusieurs cercles et plusieurs ondulations.

Ils aiment donc mieux admettre des rayons directs qui