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LETTRES FAMILIÈRES.


pas un de bon. Je reviens à l’huître : elle est malheureuse quand quelque longue maladie fait qu’elle devient perle : c’est précisément le bonheur de l’ambition. On n’est pas mieux quand on est huître verte ; ce n’est pas seulement un mauvais fond de teint, c’est un corps mal constitué.

Vous dites que je n’ai point écrit à Madame la duchesse de Mirepoix ; j’en ai découvert deux raisons : c’est qu’elle est malade, et qu’elle est dans les embarras de la Cour. A l’égard de d’Alembert, j’ai plus d’envie que lui, et autant d’envie que vous, de le voir de l’Académie ; car je suis le chevalier de l’ordre du Mérite. Il est vrai qu’à la dernière élection il y eut quelque espèce de composition faite, qui barbouille un peu l’élection prochaine ; mais je vous parlerai de tout cela à mon retour, qui sera vers le 15 ou la fin de novembre. Je suis pourtant bien ici ; mais les hommes ne quittent-ils pas sans cesse les lieux où ils savent qu’ils sont bien, pour ceux où ils espèrent d’être mieux ? J’irai vous marquer ma reconnoissance des choses charmantes que vous nous dites toujours, et qui nous plaisent toujours plus qu’à vous. Je vous félicite d’être chez Madame de Betz. Nous sommes dans des maisons de même goût ; car je me trouve au milieu des bois que j’ai semés, et de ceux que j’ai envoyés aux airs. Je vous prie de vouloir bien faire mes compliments aux maîtres de la maison, et d’agréer. Madame, le respect et l’amitié la plus tendre.


Au château de la Brède, le 12 septembre [1751].


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