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DISCOURS ACADÉMIQUE.

profusion avec laquelle il vous gratifie aujourd’hui. Il ne peut souffrir que le sort de cette académie soit plus longtemps incertain ; il va consacrer un lieu à ses exercices [1].

Ces bienfaits, messieurs, sont pour vous un nouvel engagement ; c’est le motif d’une émulation nouvelle : on doit toujours aller à la fin à proportion des moyens. Ce seroit peu pour nous d’apprendre aujourd’hui au public que nous avons reçu des grâces, si nous ne pouvions lui apprendre en même temps que nous voulons les mériter.

Cette année a été une des plus critiques que l’académie ait encore eues à soutenir ; car, outre la perte de cet académicien qui n’a point laissé dans nos cœurs de différence entre le souvenir et les regrets, elle a vu l’absence presque universelle de ses membres, et ses assemblées plus nombreuses dans la capitale du royaume que dans le lieu de sa résidence.

Cette absence nous porte aujourd’hui à une place que nous ne pouvons remplir comme nous le devrions. Quand nos occupations nous auroient laissé tout le temps nécessaire, le public y auroit toujours perdu ; il auroit reconnu cette différence que nous sentons plus que lui-même : il y a des gens dont il est souvent dangereux de faire les fonctions ; on se trouve trop engagé lorsqu’il faut tenir tout ce que leur réputation a promis.

Vous ferez part au public dans cette séance de quelques-uns de vos ouvrages, et du jugement que vous avez rendu sur une des matières les plus obscures de la physique. Vous avez donné un prix longtemps disputé : nos auteurs semblaient vous le demander avec justice. Votre incertitude vous a fait plaisir : vous auriez été bien fâchés d’avoir à

  1. ….. Moresque viris et mœnia ponet.
    Virg. Æneid., lib. I, v. 264.