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Page:Montesquieu - Le Temple de Gnide, 1824.djvu/57

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Elle a quelque chose de si naïf, qu’il semble qu’elle ne parle que le langage du cœur. Tout ce qu’elle dit, tout ce qu’elle fait, a les charmes de la simplicité ; vous trouvez toujours une bergère naïve. Des grâces si légères, si fines, si délicates, se font remarquer, mais se font encore mieux sentir.

Avec tout cela, Camille m’aime : elle est ravie quand elle me voit ; elle est fâchée quand je la quitte ; et, comme si je pouvais vivre sans elle, elle me fait promettre de revenir. Je lui dis toujours que je l’aime, elle me croit : je lui dis que je l’adore, elle le sait ; mais elle est ravie, comme si elle ne le savait pas. Quand je lui dis qu’elle fait la félicité de ma vie, elle me dit que je fais le bonheur de la sienne. Enfin elle m’aime tant, qu’elle me ferait presque croire que je suis digne de son amour.

Il y avait un mois que je voyais Camille sans oser lui dire que je l’aimais, et sans oser presque me le dire à moi-même : plus je la trouvais aimable, moins j’espérais d’être celui qui la rendrait sensible. Camille, tes charmes me touchaient ; mais ils me disaient que je ne te méritais pas.

Je cherchais partout à t’oublier ; je voulais effacer de mon cœur ton adorable image. Que je