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Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 1.djvu/300

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De l’esprit des Lois,

meilleur est celui qui frappe le plus les yeux, comme la naissance, & un certain ordre de naissance. Une telle disposition arrête les brigues, étouffe l’ambition ; on ne captive plus l’esprit d’un prince foible, & l’on ne fait point parler les mourans.

Lorsque la succession est établie par une loi fondamentale, un seul prince est le successeur, & ses freres n’ont aucun droit réel ou apparent de lui disputer la couronne. On ne peut présumer ni faire valoir une volonté particuliere du pere. Il n’est donc pas plus question d’arrêter ou de faire mourir le frere du roi, que quelqu’autre sujet que ce soit.

Mais dans les états despotiques, où les freres du prince sont également ses esclaves & ses rivaux, la prudence veut que l’on s’assure de leurs personnes ; sur-tout dans les pays Mahométans, où la religion regarde la victoire ou le succès comme un jugement de Dieu ; de sorte que personne n’y est souverain de droit, mais seulement de fait.

L’ambition est bien plus irritée dans des états où des princes du sang voient que, s’ils ne montent par sur le trône,