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Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 1.djvu/355

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Liv. VI. Chap. XV.

l’humanité. Il se trompe : la loi des douze tables est pleine de dispositions très-cruelles[1].

Celle qui découvre le mieux le dessein des décemvirs, est la peine capitale prononcée contre les auteurs des libelles & les poëtes. Cela n’est guere du génie de la république, où le peuple aime à voir les grands humiliés. Mais des gens qui vouloient renverser la liberté, craignoient des écrits qui pouvoient rappeller l’esprit de la liberté[2].

Après l’expulsion des décemvirs, presque toutes les lois qui avoient fixé les peines furent ôtées. On ne les abrogea pas expressément : mais la loi Porcia ayant défendu de mettre à mort un citoyen Romain, elles n’eurent plus d’application.

Voilà le temps auquel on peut rapporter ce que Tite-Live[3] dit des Romains, que jamais peuple n’a plus aimé la modération des peines.

Que si l’on ajoute à la douceur des

  1. On y trouve le supplice du feu, des peines presque toujours capitales, le vol puni de mort, &c.
  2. Sylla, animé du même esprit que les décemvirs, augmenta comme eux les peines contre les écrivains satiriques.
  3. Livre I.