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Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 1.djvu/596

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De l’esprit des Lois,

Philippe[1]. Si ceux qui accusent un homme, le faisoient en vue du bien public, ils ne l’accuseroient pas devant le prince, qui peut être aisément prévenu, mais devant les magistrats, qui ont des regles qui ne sont formidables qu’aux calomniateurs. Que s’ils ne veulent pas laisser les lois entr’eux & l’accusé, c’est une preuve qu’ils ont sujet de les craindre ; & la moindre peine qu’on puisse leur infliger, c’est de ne les point croire. On ne peut y faire d’attention que dans les cas qui ne sauroient souffrir les lenteurs de la justice ordinaire, & où il s’agit du salut du Prince. Pour lors on peut croire que celui qui accuse, a fait un effort qui a délié sa langue, & l’a fait parler. Mais dans les autres cas, il faut dire avec l’empereur Constance : « Nous ne saurions soupçonner celui à qui il a manqué un accusateur, lorsqu’il ne lui manquoit pas un ennemi[2] ».

  1. Plutarque, Œuvres morales, collation de quelques histoires Romaines & Grecques, tom. II, page 487.
  2. Leg. VI, cod. Theod. de famos. libellis.