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Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 2.djvu/265

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Liv. XIX. Chap. XXVII.

qu’ailleurs : mais d’un autre côté, les grands, dans ce pays de liberté, s’approcheroient plus du peuple ; les rangs seroient donc plus séparés, & les personnes plus confondues.

Ceux qui gouvernent ayant une puissance qui se remonte, pour ainsi dire, & se refait tous les jours, auroient plus d’égards pour ceux qui leur sont utiles, que pour ceux qui les divertissent : ainsi on y verroit peu de courtisans, de flatteurs, de complaisans, enfin de toutes ces sortes de gens qui font payer aux grands le vide même de leur esprit.

On n’y estimeroit guere les hommes par des talens ou des attributs frivoles, mais par des qualités réelles ; & de ce genre il n’y en a que deux, les richesses & le mérite personnel.

Il y auroit un luxe solide, fondé, non pas sur le rafinement de la vanité, mais sur celui des besoins réels ; & l’on ne chercheroit guere dans les choses que les plaisirs que la nature y a mis.

On y jouiroit d’un grand superflu, & cependant les choses frivoles y seroient proscrites : ainsi plusieurs ayant plus de bien que d’occasions de dépense, l’emploieroient d’une maniere bizarre : &