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Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 2.djvu/383

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Liv. XXI. Chap. XXI.


L’extrême éloignement de nos colonies n’est point un inconvénient pour leur sureté ; car si la métropole est éloignée pour les défendre, les nations rivales de la métropole ne sont pas moins éloignées pour les conquérir.

De plus, cet éloignement fait que ceux qui vont s’y établir ne peuvent prendre la maniere de vivre d’un climat si différent ; ils sont obligés de tirer toutes les commodités de la vie du pays d’où ils sont venus. Les Carthaginois[1], pour rendre les Sardes & les Corses plus dépendans, leur avoient défendu, sous peine de la vie, de planter, de semer & de faire rien de semblable ; ils leur envoyoient d’Afrique des vivres. Nous sommes parvenus au même point, sans faire des lois si dures. Nos colonies des îles Antilles sont admirables ; elles ont des objets de commerce que nous n’avons ni ne pouvons avoir ; elles manquent de ce qui fait l’objet du nôtre.

  1. Aristote, des choses merveilleuses, Tite-Live, liv. VII, de la seconde décade.