Aller au contenu

Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 4.djvu/279

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
261
de l’esprit des Lois.

Il est étonnant que ce grand homme n’ait pas su distinguer les ordres pour l’établissement du christianisme, d’avec le christianisme même ; & qu’on puisse lui imputer d’avoir méconnu l’esprit de sa propre religion. Lorsque le législateur, au lieu de donner des lois, a donné des conseils ; c’est qu’il a vu que ses conseils, s’ils étoient ordonnés comme des lois, seroient contraires à l’esprit de ses lois. Qu’a-t-on fait pour ôter à l’auteur la gloire d’avoir combattu ainsi l’erreur de Bayle ? On prend le chapitre suivant[1], qui n’a rien à faire avec Bayle : Les lois humaines, y est-il dit, faites pour parler à l’esprit, doivent donner des préceptes, & point de conseils ; la religion, faite pour parler au cœur, doit donner beaucoup de conseils, & peu de préceptes. Et de-là on conclut que l’auteur regarde tous les préceptes de l’évangile comme des conseils. Il pourroit dire aussi que celui qui fait cette critique, regarde lui-même tous les conseils de l’évangile comme des préceptes ; mais ce n’est pas sa maniere de raisonner, & encore moins sa maniere d’agir. Allons au fait : il faut un peu alonger ce que l’auteur a raccourci. M. Bayle avoit

  1. C’est le chapitre VII du livre XXIV.