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Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/233

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À ces six derniers Poètes plutôt rendons-nous un hommage désintéressé. Ils ont été plus curieux de mettre en œuvre, pour leur propre compte, les trésors acquis déjà, que d’ouvrir des mines nouvelles. Nous saluons ces œuvres accomplies, comme de beaux monuments au bord du chemin.

Enfin, parmi les incontestables Initiateurs, j’ai réservé ces deux Maîtres : M. Edmond de Goncourt, M. Barbey d’Aurevilly, qui, avec des principes différents, ont apporté dans l’Art les mêmes fécondes résultantes.

Les vrais mérites de M. de Goncourt ne me semblent pas être ceux qu’il désire le plus qu’on lui reconnaisse. L’histoire réduite à l’interprétation du bibelot centenaire, le document humain l’initiation du public moderne à l’Art Japonais, — c’est la part la plus apparente, ce n’est pas la plus réelle de son œuvre. — M. de Goncourt a eu, plus que personne avant lui, le sentiment de ce qu’il faut nommer (faute d’un vocable plus approprié là où les traditions de la langue sont nécessairement insuffisantes puisqu’il s’agit du plus spécial caractère qui distingue aujourd’hui d’hier) la Modernité. Il a vu, dans le masque uniforme que la science jette sur la nature partout où elle est en relation directe avec l’homme, l’humanité s’en aller des choses, les choses reprendre, dans un silence menaçant leur vie personnelle, étrangère à l’humanité ainsi vaincue par sa propre victoire et