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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/140

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» Chefs de Lebac, il y a beaucoup à faire, ici, dans votre pays.

» Avouez-le ! le cultivateur y est pauvre ! Le riz y pousse pour nourrir ceux qui ne l’ont pas planté. Que d’abus il règne ici ! Et combien peu d’enfants viennent au monde dans cette contrée !

» Le rouge ne vous monte-t-il pas au visage, quand l’habitant de Bandoung, votre voisin de l’est, vient vous visiter et qu’il se demande : Où sont les villages ? Où sont les cultivateurs ? Et pourquoi la voix de cuivre des trompettes joyeuses n’appelle-t-elle pas les hommes et les femmes aux plaisirs de la danse et du chant ? Pourquoi les jeunes filles ne chantent-elles pas en récoltant le riz ? N’êtes-vous pas tristes et honteux, quand vous allez vers le sud, de voir les flancs des montagnes sans eau, et les vallées sans sillons, sans charrues, et sans buffles ?

» Oui.. Oui.. je vous le dis… Tout cela doit attrister votre âme autant que la mienne, et nous faire remercier Dieu de ce qu’il nous a chargés de travailler ici.

» Si la population n’est pas nombreuse elle n’en a que plus de champs à cultiver ! Ce n’est pas la pluie qui fait défaut ! Les cimes de nos montagnes attirent vers la terre les nuages du ciel. Vous ne me direz pas que partout il y a des rochers ne permettant pas aux racines de prendre pied ; dans une foule d’endroits le sol est tendre et fertile ; il appelle le grain de blé et nous le rend en brins recourbés. Ici, ne règnent ni la guerre, qui écrase le riz encore en herbe, ni les maladies qui font abandonner la culture ; et les rayons du soleil ne vous donnent que la chaleur nécessaire pour mûrir vos blés, ces blés qui doivent vous nourrir, vous et vos enfants, et