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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/193

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peut vivre, remuer, et exprimer beaucoup, ce me semble.

— Assurément, mais rien que pour un moment. Je vais essayer de vous expliquer ma pensée, par un exemple. C’est aujourd’hui le 18 février…

— Mais non ! s’écria Dipanon, nous sommes encore en janvier.

— Non… non… c’est aujourd’hui le 18 Février 1587, et vous êtes enfermé au château de Fotheringay…

— Moi ! demanda Declari, qui croyait avoir mal entendu.

— Oui, vous. Vous vous ennuyez et vous cherchez une distraction. Là, dans cette muraille, se trouve une ouverture, mais elle est placée trop haut pour que vous puissiez regarder au dehors. Vous voulez pourtant y arriver. Vous mettez votre table sous la dite ouverture, et sur la table une chaise boiteuse, n’ayant que trois pieds, et encore sur ces trois pieds le troisième n’étant que peu solide. Jadis, il vous en souvient, vous avez vu, dans une kermesse, un acrobate entasser sept chaises l’une sur l’autre, et se poser la tête en bas sur la dernière. L’amour propre et l’ennui vous poussant à faire quelque chose de semblable, vous montez, en chancelant sur votre chaise boiteuse, vous, touchez à votre but, vous jetez un coup d’œil à travers l’ouverture et vous vous écriez : ô mon Dieu !… Cela dit, vous tombez. Pouvez-vous me dire, à présent, pourquoi vous vous êtes écrié : ô mon Dieu !… et pourquoi vous venez de tomber ?

— Probablement parceque le troisième pied venait de se casser !… répondit sentencieusement Dipanon.

— Oui, le pied s’était brisé, sans doute, mais là