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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/278

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On s’était habitué à ce qu’on appelait sa monomanie, et bientôt, on n’y fit plus attention.

Tout semblait respirer le calme ; en effet, pour Max et pour Tine, c’était relativement peu de chose que de supporter certaines privations, inévitables dans un poste situé à l’intérieur, en dehors de la grande ligne.

Quand on ne faisait pas de pain sur les lieux mêmes, on ne mangeait pas de pain, et c’était tout.

On aurait pu le faire venir de Serang, mais les frais de transport se seraient élevés trop haut.

Max savait aussi bien que les autres, qu’il y avait plus d’un moyen de faire apporter du pain à Rangkas-Betoung, et cela sans bourse délier ; mais le travail non rétribué, cette plaie des Indes, lui faisait horreur.

Il s’en trouvait aussi beaucoup à Lebac, qu’on eut pu se procurer gratuitement, par ordre, mais il ne s’en trouvait pas à prendre à un prix raisonnable ; aussi Havelaar et sa Tine en subissaient-ils facilement la privation.

Ils en avaient subi bien d’autres.

Cette pauvre Tine avait bien passé des mois à bord d’un navire arabe, sans ombrelle, sans abri contre les ardeurs du soleil, et contre les ondées de la mousson de l’Ouest, entre les pieds d’une petite table à laquelle elle était obligée de se cramponner, au moindre mouvement du navire.

N’avait-elle pas dû, sur ce même navire, se contenter d’une mince ration de riz, et ne boire que de l’eau salée !…

Et tout cela elle l’avait supporté patiemment, heureuse qu’elle était de pouvoir rester aux côtés de son Max.