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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/367

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Adenda, si l’animal avait été moins fidèle, et moins courageux.

Les étoiles se couchaient, et disparaissaient à l’Ouest ; Saïdjah ne les quittait pas des yeux… À chaque étoile, qui s’effaçait dans l’horizon, il calculait que le soleil était plus près de se lever du côté de l’Orient ; il se sentait lui-même plus près du moment, qui devait le réunir à son Adenda.

— Bien sûr, pensait-il, elle arrivera dès le premier rayon… oui… au crépuscule, elle sera ici !… Oh ! pourquoi n’est-elle pas ici depuis la veille du jour convenu ?

Il s’affligeait de ce qu’elle n’eût pas devancé l’heureux moment, qui, trois années durant, avait enchanté sa pensée ; la force de son amour le rendait injuste ; il lui semblait qu’Adenda eut dû se trouver là, et l’attendre, lui, qui se plaignait, maintenant, déjà avant l’heure du rendez-vous donné.

Cependant, il se plaignait bien à tort !… le soleil n’était pas encore levé !…

Le jour n’avait pas encore lancé un regard sur la plaine.

Les étoiles pâlissaient, là-haut, devant l’éclat du soleil, qui montait derrière l’horizon ; les cimes des montagnes s’enveloppaient de couleurs bizarres, qui les faisaient ressortir sur le fond clair de la nature.

Ça et là, à travers les nuages de l’Est, partaient des traits brillants comme des flèches d’or, et de feu, lancées parallèlement à l’horizon, mais, ces traits d’or et de feu, météores d’un instant, mouraient dans le moment même où ils venaient de naître, disparaissaient, et semblaient retomber derrière le rideau mystérieux, qui tenait le jour caché devant les yeux de Saïdjah.