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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/87

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contributions payées autrefois par elle à ses seigneurs. Rien de plus ordinaire que de voir convoquer des centaines de familles, — venant de très loin, — pour qu’elles cultivent, sans rétribution, les champs du Régent ; rien de plus ordinaire que de fournir gratis des vivres à la cour du Régent, et s’il arrive à ce dernier de jeter un regard de convoitise sur le cheval, le buffle, la fille ou la femme de l’homme du peuple, ce serait un acte inouï de la part du possesseur que de refuser de se défaire, sans conditions, de l’objet désiré.

Certains Régents, faisant un usage modéré de leur pouvoir arbitraire, n’exigent du prolétaire que ce qui est absolument utile pour maintenir leur rang ; d’autres vont un peu plus loin. Tous outrepassent leurs droits. Aussi est-il difficile, sinon impossible, d’extirper radicalement des abus entrés dans les mœurs mêmes de la population, qui en souffre. Le Javanais est généreux, surtout lorsqu’il s’agit de donner un témoignage d’attachement à son chef, au descendant de ceux auxquels ont obéi ses ancêtres. Il croirait manquer du respect qu’il doit à son seigneur héréditaire, s’il se présentait à son palais, sans cadeau. Ces présents sont souvent d’une valeur si minime, que les refuser serait humiliant ; c’est plutôt l’hommage d’un enfant qui tâche d’exprimer son amour par quelque modeste offrande, que le tribut dû au despote. Or, l’existence de certains usages gracieux, rend difficile l’abolition de ces abus criants.

Si l’esplanade de la résidence du Régent se trouvait négligée, la population voisine en aurait honte, et il faudrait un déploiement d’autorité pour l’empêcher d’enlever les mauvaises herbes, et de mettre la place dans un état conforme au rang du Régent. Vouloir