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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/111

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LA TEUFELSGRAT

choses qui, l’assurions-nous, étaient de peu d’importance s’il ne commençait par bien placer ses pieds. Un peu plus loin, nous sommes forcés d’abandonner l’arête pour la face du Weingarten. Chaque saillie, chaque corniche était tellement garnie de débris perdus et roulants qu’il devenait impossible de se mouvoir sans détacher quelques larges dalles ou quelques grosses pierres. Elles glissaient sous nos pieds, amassaient autour d’elles une véritable avalanche, et rebondissaient de ressauts en ressauts avant de faire un terrible plongeon final jusqu’au glacier. Arrivés à la fin de ces pentes et de ces saillies, nous sommes ramenés en haut par des « Latten », des strates, et forcés de réescalader l arête une fois de plus. Pendant ce temps, les plaintes lugubres du pauvre Andenmatten venaient soulever notre pitié, aussi fîmes-nous halte pendant quelques minutes, tant pour examiner son dos que pour présenter à ses lèvres certain remède bien connu. En même temps, un bon avis lui fut donné, à savoir qu’il est absolument inutile de se plaindre de toute espèce de douleurs fussent-elles au dos ou ailleurs, si l’on n’est pas dans un endroit où on puisse les traiter.

Sur ce, nous recommençons à travailler. Un gendarme impraticable se présente devant nous et nous voici obligés de passer sur la face du Glacier de Kien, le long d’une pente rapide de glace à l’aspect des moins engageants. De ci et de là, une dalle rocheuse sort de la glace, promettant une petite saillie pour la main, mais invariablement se trouvant, à l’épreuve, être désagrégée et se détachant au plus léger toucher. Pareille somme de marches à tailler était extrêmement ennuyeuse pour Burgener. Parfois sa main se mettait à saigner de nouveau, et un grognement de douleur s’échappait de ses lèvres toutes les fois que, d’un coup de piolet, il envoyait les fra-