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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/232

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CHAPITRE VIII


L’AIGUILLE DU PLAN


Je fis la connaissance de l’Aiguille du Plan en compagnie de MM. Cécil Slingsby et Ellis Carr, pendant deux mémorables journées de 1892[1]. En cette occurrence un mauvais sort nous repoussa, battus, abattus et affamés ; et, comme nous revenions ennuyés à la maison, les énormes séracs, en équilibre au dessus du premier mur de glace, semblaient dans la lumière incertaine du crépuscule se rire de nous et montrer d’un doigt méprisant notre piteuse et triste apparition. Néanmoins, tout joués et meurtris que nous étions, Slingsby était fortement d’avis que « nous avions fait une belle ballade par monts et par vaux tout un jour durant », ou mieux deux jours durant, et il assurait avec le plus grand enthousiasme que c’était la plus belle escalade que nous avions jamais eu la chance de faire.

  1. Les 14 et 15 août. Le 14, Mummery, après une escalade ardue de rochers, entreprit d’entailler une colossale muraille de glace. La nuit du 14 au 15, de 8 h. 30 soir à 4 h. mat., fut passée sur une petite plaque de roc, plus ou moins solide, la corde entourant, de peur d’une chute pendant leur sommeil, nos trois grimpeurs, assis l’un contre l’autre. De 2 h. à 4 h. le froid devint plus intense et fut aggravé par le vent du matin. Malgré des provisions sommaires, la caravane reprit l’attaque et Mummery recommença il tailler malgré le froid mais, la lutte se prolongeant, les grimpeurs furent obligés de battre en retraite après une des plus énergiques expéditions qu’on eût jamais faites. On pourra en lire l’attachant récit : « Two Days on a Ice Slope», par M. Ellis Carr, dans l’Alpine Journal, XVI, 422-46 (avec croquis d’itinérairel). — M. P.