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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/270

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L’AIGUILLE VERTE

un ressaut d’au moins 12 mètres avant d’atteindre le glacier libre ; nous tournâmes jusqu’à la crevasse entre le sérac et la falaise de glace pour nous aider à descendre. Tandis que la première crevasse, s’était trouvée trop étroite pour être commode, celle-ci était tout le contraire, et les premiers 3 mètres eurent à être descendus à l’aide de marches pour les pieds et de prises pour les mains. Il devient alors possible d’atteindre de la tête le mur opposé et la descente peut une fois encore être faite avec une facilité normale. Après avoir atteint le niveau du glacier, un long saut de côté me porte sur la neige libre et nos ennuis sont loin. Sans perdre de temps, car le passage de la rimaye nous a coûté deux heures de travail, et il est maintenant 6 h. soir, nous descendons en courant vers le Couvercle, aussi vite que nos jambes peuvent nous le permettre. Nous atteignons ce port désiré en dix minutes : il n’est pas besoin de dire que dans ces endroits où aucune glissade n’était possible, nous allions à toutes jambes. Puis l’excitation de l’escalade étant tombée, la majesté de notre démarche s’accroît de tout ce que perd la rapidité de notre marche, et sur chacune des moraines de la Mer de Glace, nous trouvons bon de réarranger notre bagage, de contempler la vue, ou de nous engager dans quelque autre occupation également importante et entraînant un repos de cinq minutes sur une pierre plate. Grâce à ces retards variés, il est presque 8 h. soir avant que nous réintégrions le Montenvers. Venetz nous rencontre à la porte et se lamente amèrement sur la perte de cette expédition pour lui ; mais nous mettons du baume sur ce cœur blessé en lui promettant qu’il grimpera autant que cela lui plaira sur le Grépon[1].

  1. C’est en effet 4 et 6 jours après qu’eurent lieu les ascensions racontées au chapitre VI. — M. P.