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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/276

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L’AIGUILLE VERTE

mutuellement admirer le splendide toit en avancement, le parfait abri comme gîte, et l’admirable appartement en sous-sol où, semble-t-il, on pourra se reposer au chaud, au sec et en sécurité, même si le vieil Éole ouvrant ses outres nous envoie toutes les tempêtes qui hurlent à travers monts. À ce moment une blanche rafale nous assaille, balayée d’en haut. Nos chapeaux et autres effets mobiles nous sont arrachés rudement et nous-mêmes sommes littéralement enlevés de notre cave. Et nous voici tons immédiatement d’accord pour dire que cet appartement souterrain n’est qu’un trompe-l’œil et pour revenir incontinent au gîte accoutumé. Mais nous avons bientôt découvert que son énorme toit en avancement constitue un excellent éventail et nous renvoie, dans toute la force de leur éclatement, des morceaux de glace aigus agrémentés d’une sorte de grêle et de grésil, et cela dans tous les coins, dans toutes les fissures que l’on puisse trouver.

La pluie et la neige fondante qui tombaient sur le faîte du roc descendaient à l’intérieur ; les coulées les plus importantes furent promptement capturées et emprisonnées dans nos diverses bouteilles ainsi que dans nos bouilloires d’étain, pour nous permettre de procéder aux opérations culinaires, sans la moindre pénible et longue recherche de source ou de ruisselet. Pourtant, lorsqu’un courant inattendu descendit dans le cou de l’un de nous, ou quand la pierre de l’autre fut submergée tout à coup, nos sentiments d’altruisme s’évanouirent, et cela nous amena à prier ardemment, et du fond du cœur, que ces bénédictions variées nous fussent promptement enlevées, et placées à portée commode ou des dieux ou d’une autre humanité souffrante.

À la fin de la nuit, la pluie cessa, et le brouillard nous