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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/286

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L’AIGUILLE VERTE

mais je suis bientôt amené à l’opinion que si un autre itinéraire est possible, il est désirable de le prendre. Pendant que je me sors de ces difficultés, Collie tourne sur la droite et après une courte lutte surmonte l’obstacle. Quelques mètres plus loin nous sommes repoussés par un ressaut à pic, qui ne peut pas être tourné et qui défie tout effort unique. Hastings m’élève d’un coup jusqu’à ce que je puisse saisir une saillie sur le sommet du bloc ; après quelques mouvements spasmodiques je peux enfin atteindre une bonne marche. Ce genre d’exercice continue quelque temps.

Une délicieuse petite traversée est pourtant digne d’être rapportée. Un grand gendarme nous barrant tout assaut direct, nous le contournons sur la face de la Charpoua. Au dessus de nos têtes une masse de rochers en surplomb nous force à abandonner toute attitude correcte et nous voici forcés de ramper comme des vers le long d’une corniche se déversant en dehors. À la fin de ce passage, nous pouvons reprendre une posture normale, mais cet avantage est plus que compensé par la nécessité d’abandonner toute prise pour les mains et de faire une longue enjambée au dessus d’une vilaine coupure sur un rocher étroit, verglassé et en forte pente. Ce passage n’est, certes, pas difficile à faire, mais je trouve qu’en pareil lieu l’esprit s’arrête désagréablement sur les conséquences probables de la plus légère erreur ou du plus petit manque d’équilibre. Une fois en sécurité au delà, je me trouve au pied d’une tour à pic garnie et flanquée de neige et de glace. Une escalade directe était hors de question, mais en allongeant un cou de cigogne tout autour de la tour on pouvait apercevoir une corniche, partie roc partie glace, qui contournait la tête d’un grand couloir tombant jusqu’au Glacier de la Char-