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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/396

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PLAISIRS ET PÉNALITÉS

juger avec une certitude suffisante les effets causés, par la neige nouvelle d’un côté, par la persistance du beau temps de l’autre, sur les séracs qui dominent les pentes inférieures des glaciers. Les commençants oublient facilement que les chutes de glace ne sont jamais plus à craindre que lorsqu’un soleil prolongé a travaillé fortement ces monstres suspendus en équilibre au dessus d’eux et qui guettent les traces où ils vont passer. Faire concorder une expédition avec l’état météorologique nécessaire pour la mener à bien est fréquemment d’une importance toute critique ; cela peut conduire non seulement a la différence qu’il y a entre la réussite et l’insuccès, mais même à celle qui existe entre la santé et la gaîté d’une part et un désastre irrémédiable de l’autre.

Sous ce rapport, il faut noter qu’une caravane inattachée est plus en sûreté qu’une caravane encordée, et que ses chances d’échapper aux projectiles que la montagne tient en réserve, varient au moins en sens inverse de sa longueur. À trois à la corde, celui du milieu est plus ou moins un meuble à demeure et il a fort peu de chances d’esquiver les chutes de pierres, à moins qu’il n’ait un abri sous la main. S’il n’y a pas d abri possible, le fait, que la caravane est répandue sur une grande étendue de rocher, rend très probable que la vraie façon d’éviter les pierres est pour le premier et le dernier d’être dans une direction opposée. Dans ce cas, aucun mouvement n’est permis à celui qui est au milieu et sa position n’est guère enviable. Personnellement, je préfère beaucoup quitter la corde dans de pareils endroits, et s’il vaut mieux ne pas le faire, je considère deux comme le nombre maximum permis. J’ajouterai que c’est l’opinion préconisée par des hommes tels que Alexandre Burgener et Émile Rey. J’ai vu chacun d’eux faire à l’addition d’un troisième