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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/334

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Il faut dire qu’on l’aide un peu malgré soi. Cependant comment pêcher, endormi ou non, un mot dans la cervelle d’un homme ? Du reste, la même demoiselle Julie a lu très vite ton propre nom, écrit de ma blanche main sur un morceau de papier que je lui avais délicatement glissé dans le dos, sous sa robe. Ce genre de lecture n’est pas très commode. Elle répétait sans cesse Po, Po, d’une voix presque éteinte. « Eh bien, lui dit Achille, Po, Po ! après ? » Elle a fait un éclat de rire, et elle a prononcé ton nom. Ainsi, mon cher ami, tu es de moitié dans la farce. Qu’est-ce que c’est que tout cela ? je n’en sais rien du tout.

Je ne sais pas si vous savez, vous autres, à Catane, que le Principe*** a enlevé la comtesse de***. Il y avait deux ans qu’ils étaient ensemble au su de tout Paris. La comtesse s’est disputée, à ce qu’il paraît, avec son mari ; elle est arrivée chez le prince (qui devait chanter le soir dans un concert) ornée de son mouchoir pour tout bagage, et elle lui a dit : « Allons-nous-en. » Ils sont en route. Le vent est aux enlèvements à Paris, dans ce moment-ci, ou pour mieux dire, aux séparations. Je viens de voir de mes yeux la même plaisanterie, qui est beaucoup moins gaie qu’on ne pense. Je t’expliquerai cela un jour ; mais, si tu m’en crois, n’enlève jamais personne, à moins que ce ne soit la reine d’Espagne.

Que te dirai-je encore de nouveau ? Mademoiselle H… (tu t’en souviens) se marie. Mademoiselle de B… se marie. Mademoiselle T… s’est mariée, il y a un mois,