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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/35

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temps et des caractères simples, pour mieux se préparer, par le contraste des sujets, à traiter de la maladie du siècle et à créer les deux types compliqués d’Octave et de Desgenais, car il aimait à mener deux idées de front et rêvait volontiers de l’une au moment même où il exécutait l’autre. La Confession d’un enfant du siècle aurait été écrite avec autant de rapidité que Lorenzaccio si l’auteur ne se fût plusieurs fois interrompu dans ce long travail. D’abord, il voulut protester, au nom de la poésie, contre un projet de loi désastreux pour les libertés publiques et dont l’attentat de Fieschi était le prétexte. La Revue des Deux Mondes publia le 1er septembre les vers intitulés la Loi sur la presse, et le 15 du même mois l’introduction de la Confession d’un enfant du siècle. Un détail rassurant fera connaître l’état d’esprit de l’auteur. Entre deux de ces pages brûlantes où il traçait un tableau si sombre du mal de la désespérance, il s’interrompit encore pour improviser en quelques jours le Chandelier, qui est assurément une de ses comédies les plus gaies.

Il nous faut parler maintenant d’un incident qui devait porter une nouvelle atteinte au repos du poète. Malgré le peu de loisirs que lui laissaient ses travaux, Alfred avait encore trouvé le temps de visiter assidûment une jolie femme, d’en devenir amoureux et de se faire aimer d’elle en lui adressant les stances À Ninon. Il débuta dans ce nouvel amour par un accès de jalousie qui lui fit croire, un moment, qu’il avait perdu la faculté d’aimer. À peine eut-il reconnu et réparé sa faute que son bonheur s’envola. Un mot suffit pour apprendre au lecteur ce qui advint : la dame n’était autre que le personnage d’Emmeline, et dans