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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/448

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Barberine

Et vous n’osez plus ? Vous me disiez, je crois, que vous aviez de l’amour pour une femme qui est mariée à l’un de vos amis ?

Rosemberg

Un de mes amis ! je n’ai pas dit cela.

Barberine

Je croyais l’avoir entendu. Mais êtes-vous sûr que j’aie mal compris ?

Rosemberg, à part.

Que veut-elle dire ? Ce regard si terrible me semble à présent singulièrement doux.

Barberine

Eh bien ! vous ne répondez pas ?

Rosemberg

Ah ! madame… Si vous avez pénétré ma pensée…

Barberine

Est-ce une raison pour ne pas la dire ?

Rosemberg

Non, je le vois ! vous m’avez deviné. Ces beaux yeux ont lu dans mon cœur, qui se trahissait malgré moi. Je ne saurais vous cacher plus longtemps un sentiment plus fort que ma raison, plus puissant même que mon respect pour vous. Apprenez donc à la fois, comtesse, et ma souffrance et ma folie. Depuis le premier jour où je vous ai vue, j’erre autour de ce château, dans ces montagnes désertes !… L’armée, la cour ne sont plus rien pour moi ; j’ai tout quitté dès que j’ai pu trouver