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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes II.djvu/138

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roir, prit une des deux robes que son oncle lui montrait, le regarda tendrement, lui tendit la main, et fit un petit signe de tête pour dire : Oui.

À ce signe, le bonhomme Giraud se mit à sauter comme un enfant, avec ses gros souliers. Il triomphait : l’heure était enfin venue où il accomplissait son dessein ; Camille allait se parer, sortir avec lui, venir à l’Opéra, voir le monde : il ne se tenait pas d’aise à cette pensée, et il embrassait sa nièce coup sur coup, tout en criant après la femme de chambre, les domestiques, tous les gens de la maison.

La toilette achevée, Camille était si belle, qu’elle sembla le reconnaître elle-même, et sourit à sa propre image. — La voiture est en bas, dit l’oncle Giraud, tâchant d’imiter avec ses bras le geste d’un cocher qui fouette ses chevaux, et avec sa bouche le bruit d’un carrosse. Camille sourit de nouveau, prit la robe de deuil qu’elle venait de quitter, la plia avec soin, la baisa, la mit dans l’armoire, et partit.