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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes II.djvu/174

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à l’écurie de Renonval. Et la semaine dernière, à la fête, cette même marquise, toujours de noir vêtue, n’a-t-elle pas trouvé naturel de m’installer dans la grande calèche avec mon chien et monsieur le curé, pour grimper dans ton tilbury, au risque de montrer sa jambe ?

— Qu’est-ce que cela prouve ? il fallait bien que l’un de nous deux subît cette corvée ?

— Oui, mais cet un, c’est toujours moi. Je ne m’en plains pas, je ne suis pas jaloux ; mais pas plus tard qu’hier, au rendez-vous de chasse, n’a-t-elle pas imaginé de quitter sa voiture et de me prendre mon propre cheval, que je lui ai cédé avec un désintéressement admirable, pour qu’elle pût galoper dans les bois à côté de monsieur l’officier ? Plains-toi donc de moi, je suis ta providence ; au lieu de te renfermer dans tes dénégations, tu me devrais, honnêtement parlant, ta confiance et tes secrets.

— Quelle confiance veux-tu qu’on ait dans un étourdi tel que toi, et quels secrets veux-tu que je te dise, s’il n’y a rien de vrai dans tes contes ?

— Prends garde à Gitana, mon frère.

— Tu m’impatientes avec ton refrain. Et quand il serait vrai que j’eusse fantaisie d’aller ce soir faire une visite à Renonval, qu’y aurait-il d’extraordinaire ? Aurais-je besoin d’un prétexte pour te prier d’y venir avec moi ou de rentrer seul à la maison ?

— Non, certainement ; de même que, si nous venions à rencontrer madame de Vernage se promenant devant