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Page:Myrand - Frontenac et ses amis, 1902.djvu/158

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APPENDICE

qui désirent s’en convaincre n’ont qu’à lire à ce sujet le superbe mémoire de l’abbé Auguste Gosselin, intitulé : Un épisode de l’histoire du théâtre au Canada, et lu devant la Société Royale, à sa séance du 25 mai 1898.

Les Mémoires sur la Vie de M. de Laval de l’abbé La Tour ont été publiés à Montauban en 1762. Le Mémoire de l’abbé Gosselin est paru à Ottawa en 1898. Conséquemment, il s’est écoulé près d’un siècle et demi — cent trente-six ans — de silence entre l’attaque et la défense, entre la diffamation et la réhabilitation de Frontenac, silence accusateur, interprété malicieusement, dans le sens d’un tacite aveu. La réfutation victorieuse de l’abbé Gosselin atteindra-t-elle jamais tous ces milliers de lecteurs qui ont lu, lisent et liront dans les in-quarto de l’encyclopédie Migne et dans les deux éditions de l’historien Ferland les calomnies inexcusables de La Tour ? Calculez le temps nécessaire et le temps perdu à rejoindre cette multitude. « Rien ne sert de courir, a dit le Fabuliste, il faut partir à point. » Cherchons d’abord à rattraper les professeurs d’histoire du Canada — ils sont déjà légion dans le pays — qui enseignent de bonne foi, et continueront indéfiniment d’enseigner à nos enfants dans les séminaires et les couvents, les collèges et les académies, partout enfin où il y a une école modèle, qu’en l’an de grâce 1694, à Québec, sub pontio Frontenac, la comédie de Tartufe fut jouée, avec corps de ballet évoluant aux intermèdes, devant un auditoire d’ursulines, d’hospitalières et de jésuites que le farouche gouverneur avait fait réunir manu militari et torto collo. Ah ! le monstre de Frontenac !

Comme succès de scandale historique, j’avoue qu’il est difficile d’en rêver un plus complet. La Tour a frappé là un maître coup et je me demande si l’on ne devrait pas applaudir. Ce calomniateur est un artiste !

Que notre admiration pour La Tour ne nous fasse pas oublier cependant d’adresser un exemplaire du Mémoire de l’abbé Auguste Gosselin à tous les professeurs d’histoire du Canada.[1]

Tout ce que l’on pourrait raisonnablement reprocher à Frontenac dans cette affaire est un péché d’intention. Il se proposait

  1. Cf : Mémoires de la Société Royale du Canada — deuxième série, 1898-99, Vol. IV, sec. I, pages 53 à 72.