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Page:Myrand - Frontenac et ses amis, 1902.djvu/171

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APPENDICE

Moins de trois ans auparavant, en effet, en 1677, le gouverneur écrivait à Colbert :

« Pour la pointe du Saut Saint-Louis, qu’ils (les Jésuites) demandent sous le nom des Sauvages, et que M. l’Intendant leur a accordée sans ma participation, contre l’ordre et contre la promesse que lui et moi en avions fait à M. de la Salle, qui le justifie par une lettre de M. du Chesneau, ils (les Jésuites) n’ont point d’autre fondement pour la prétendre qu’une raison politique qui est qu’il ne leur manque que cet endroit pour avoir toutes les avenues de la Grande Rivière, où ils possèdent déjà la Prairie de la Madeleine, l’île de Montréal, et l’île de Jésus ; mais outre cela M. l’Évêque et M. le Major, qui est entièrement uni avec eux, prétendent avoir des concessions pour cela et faire des habitations au delà de Montréal, à la Chute des Outaouais et autres Sauvages du nord-ouest et de l’ouest, ce qui serait la ruine entière de la Colonie, qui n’aurait que leurs restes. »[1]

Que s’était-il donc passé entre les années 1677 et 1680 pour amener dans l’esprit du gouverneur un tel revirement d’opinion ? J’ignore absolument le motif d’une pareille volte-face. Je constate seulement, et avec bonheur, l’évolution de ce grand esprit vers la justice et la vérité. Si l’on en juge par ses écrits subséquents, Frontenac ne retourna pas à ses anciens préjugés.

Il serait même devenu sympathique au clergé et lui rendrait volontiers témoignage. Le passage suivant de sa correspondance officielle mérite d’être retenu :

« Les ecclésiastiques sont tous, SANS EXCEPTION, remplis de vertu et de piété, et si leur zèle n’était pas si véhément, mais un peu plus modéré, ils réussiraient peut-être mieux dans ce qu’ils entreprennent pour la conversion des âmes. Mais ils usent souvent, pour en venir à bout, de moyens si extraordinaires et si peu usités dans le royaume, qu’ils rebutent la plupart des gens, et c’est en quoi je leur dis quelquefois mon sentiment avec franchise et avec le plus de douceur que je puis, » etc.

La douceur de Frontenac ! À l’exception de sa femme, Anne de la Grange, qui lui en délivra un certificat en pouffant de rire

  1. Cf : Pierre Margry, Voyages des Français sur les grands lacs. — Accusations de Frontenac — Lettre à Colbert, 1677.
    Vol. I, page 322. — Paris, 1879 — Maisonneuve et Cie, éditeurs.