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246 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

dente fournaise de l'Etat à venir que nous rêvons. L'objet de ma plus inti me ferveur, de ma plus secrète flamme, de ma plus profonde foi et de mon suprême espoir n'a point changé. C'est toujours l'Etat. Bâtir l'Etat comme un temple, l'ériger avec force et pureté, qu'il se maintienne par son propre poids, sévère et sublime, mais plein de sérénité aussi et entouré de clairs portiques comme sont les demeures des Dieux. »

Et dans les loisirs que lui laisse une blessure de guerre il conçoit sur l'Etat un important ouvrage en trois volumes qui devait comprendre : l'histoire des diverses théories de l'Etat, puis celle de la succession de ses formes au cours du devenir, enfin l'esquisse de ses formes actuelles et futures, de sa néces- saire forme nouvelle.

La partie des N achgelassene Schriftm la plus importante, la plus susceptible surtout d'intéresser des lecteurs français, est celle qui de va de 1914 à 1918. Quoiqu'il y soit plus souvent question d'idées, d'art, de politique ou d'histoire que de batailles, c'est là un des rares beaux livres de guerre du côté allemand, et d'un niveau à pouvoir se mesurer avec certains récits de combattants français.

Dès les premiers jours d'août (il venait d'avoir dix-sept ans) Otto Braun se présente comme volontaire. L'affluence est si grande qu'il faut l'intervention de Mackensen, ancien aide de camp de son grand-père Kretschmann, pour lui obtenir la faveur d'être enrôlé.

Il est tout brûlant d'amour pour sa patrie, mais sans infa- tuation.

« Je suis persuadé », écrit-il, « que l'Allemagne ne peut périr, quoiqu'au contraire de nos braillards, je fonde cette foi, non sur le sentiment de notre supériorité ou de notre savoir- faire, mais sur Tidée précisément de notre imperfection, de notre inachèvement.

— L'Allemagne que nous portons dans notre cœur n'a pas pris forme encore. Nous n'avons satisfait à notre destinée ni dans les arts ni en poésie ; surtout n'avons-nous pas réussi à dessiner notre vie, la tâche qui nous est échue est plus difficile que celle d'autres peuples parce que nous sommes plus multiformes et plus divisés... c'est dans cet esprit là que je pars pour me battre, pour défendre notre bien le plus sacré... Il me paraît vil et sot-

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