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Page:NRF 19.djvu/219

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CHRONIQUE DRAMATIQUE 21 J

lis, paresse, ou écris. Rien ne pourrait faire, quand je suis là, qu'ils ne soient pas autour de moi, surraesgenoux, mes épaules, me prodiguant leurs démonstrations affectueuses, si je ne fais rien, en parlant, — car les animaux, et surtout les chats, ont un langage et parlent, — ou me regardant, immobiles et silen- cieux, si je suis occupé. Je parle là du caractère. Il en est de même pour le physique. Sur ce point encore, les animaux sont comme nous. Ils ont comme nous deux yeux, un nez, une bouche et des oreilles, mais quelque chose dans l'expression les différencie chacun. Trois chats, — puisque je parle de chats, — noirs, tigrés, blancs ou jaunes, ne sont pas du tout, quand on regarde bien leur physionomie, trois chats noirs, tigrés, blancs ou jaunes, mais bien un chat, un autre chat, et encore un autre chat noir, tigré, blanc ou jaune. Des gens riront de ce que j'écris là, peut-être ? Ce sont des gens qui passent sans rien voir à rien. Ce qui est merveilleux aussi, c'est la confiance qu'on peut arriver à leur inspirer. J'habite un pavillon composé d'un rez-de-chaussée et d'un premier. Pour aller de l'un à l'autre, un escalier. Les chats aiment beaucoup un escalier. Ils y font de bonnes parties, dégringolades ou montées rapides, ou jeux d'attrape au long des barreaux de la rampe, ou si le soleil donne ils somnolent sur les marches. Il arrive que ma bonne ou moi, pour les soins de la maison, nous montions ou descendions cet escalier, rapidement, — moi surtout, qui n'ai pas les jambes dans ma poche, — chargés d'un seau, d'un broc, d'un balai, en faisant plus ou moins un certain bruit. Personne ne se dérange. Chacun sait bien qu'on saura passer sans les toucher. J'ai un énorme chien qui vit au premier. On le fait descendre de temps en temps pour les repas, pour la prome- nade dans le jardin. Aucun chat sur son passage ne se dérange davantage. Lui-même sait dégringoler l'escalier sans en toucher aucun. Il fait comme nous : il enjambe. Quant au ménage des chats et des chiens ensemble, c'est purement merveilleux. La nuit, les chiens sont enfermés. Quand ils retrouvent les chats le matin, c'est de leur part de grands bonjours, à coups de langue sur leur nez, les chats de leur côté leur prodiguent de petits coups de tête, en ronronnant d'aise. Les uns et les autres font de grandes parties dans le jardin, sans jamais la moindre brutalité de la part des chiens. Je viens de parler de cet énorme

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