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Page:NRF 3.djvu/109

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��JOURNAL SANS DATES

��J'aimerais France avec plus d'abandon si certains imprudents n'en voulaient faire un écrivain considérable. Alors je m'interroge. Je crains de n'avoir pas été juste ; je reprends la Vie littéraire, le Jardin d'Epicure surtout où se confie le plus immédiatement sa pensée. J'y lis cette phrase à laquelle aussitôt j'applaudis :

Une chose surtout donne de V attrait a la pensée des hommes : c'est V inquiétude. Un esprit qui n'est point anxieux m'irrite et m'ennuie.

Je songe au mot de Goethe :

Le tremblement l est le meilleur de l'homme. Hélas ! préci- sément... et j'ai beau m'y prêter... Je ne sens point le tremblement de France ; je lis France sans tremblement.

Il est disert, fin, élégant. C'est le triomphe de l'euphé- misme. Mais il reste sans inquiétude ; on l'épuisé du premier coup. Je ne crois pas beaucoup à la survie de ceux sur qui d'abord tout le monde s'entend. Je doute fort que nos petits-enfants, rouvrant ses livres, y trouvent plus et mieux à lire que ce que nous y aurons lu, et qu'ils puissent nous accuser de ne l'avoir pas bien compris. Il ne précède pas notre pensée.

Du moins l'explique-t-il. C'est de cela que ses lecteurs lui savent gré. On se flatte à l'aimer — à se dire : que cela est joli ! c'est tout de même ainsi que je pensais. 1 Das Schaudern.

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