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Page:NRF 3.djvu/111

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JOURNAL SANS DATES IO5

soit sincère ; mais bien que la sincérité profonde exige une manière nouvelle et qui paraît d'abord préciosité.

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��Il est possible que cette pièce de Giacosa soit fort belle. L'Illustration vient de la publier ; je l'ai là ; je la prends, la reprends ; je m'efforce en vain à la lire ; les cinquante mille personnes qui la lisent par dessus mon épaule aujourd'hui, m'en rendent la lecture impossible ; c'est déjà cette gêne que j'éprouve si fort au théâtre : je ne sens rien de vrai, que seul. Et c'est peut-être aussi pourquoi j'ai si grand, peur de l'éloquence. Je n'écoute un auteur que lorsqu'il pourrait me dire : " J'ai versé telle larme pour toi ".

Et moi-même lorsque j'écris, je ne m'adresse jamais qu'à quelqu'w» — à moins que, comme je fais ce soir, à personne.

Et puis, cette pièce, il me semble qu'on l'a fort bien comprise. J'ai ce travers de ne croire qu'aux œuvres qu'on ne comprend pas bien d'abord, qui ne se livrent pas sans réticence et sans pudeur. On n'obtient rien d'exquis sans effort ; j'aime que l'œuvre se défende, qu'elle exige du lecteur ou du spectateur cet effort par quoi il obtiendra sa joie parfaite.

Toutes les grandes œuvres d'art sont d'assez difficile accès. Le lecteur qui les croit aisées, c'est qu'il n'a pas su pénétrer au cœur de l'œuvre. Ce cœur mystérieux, nul besoin d'obscurité pour le défendre contre une approche trop effrontée ; la clarté y suffit aussi bien. La très grande clarté, comme il advient souvent pour nos plus

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