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Page:NRF 3.djvu/123

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NOTES 117

LA BIEN-AIMEE, par Jean-Louis Vaudoyer. Le premier livre de M. Jean- Louis Vaudoyer était unique- ment une œuvre romanesque ; il n'étudiait aucune particularité de la vie contemporaine, mais ce qu'Edgar Poë appelle l'esprit de roman. On y voit un jeune peintre épris d'une actrice, lui écrire, l'entretenir de loin de sa passion, puis au premier rendez- vous, se dérober pour ne pas abîmer son rêve. Jusqu'ici, rien que nous ne sachions déjà. Mais l'original de l'Amour Masqué, c'est qu'au bout de quelques années, les hasards de la vie mettent ce François Feubrise en présence de la jeune femme. Il devient son amant, et le jour où il lui révèle que son ancien amoureux et lui ne sont qu'une même personne, l'actrice ne veut plus le revoir. Le curieux, le nou- veau d'un tel livre est dans la superposition, on peut même dire dans le conflit de ces deux amours, l'imaginaire et le réel, plutôt encore que dans l'heureux agencement des détails, la sûreté avec laquelle ce récit est conduit, le pittoresque de certaines scènes comme la visite à un fabriquant de tissus imités de l'antique. Mais le défaut essentiel de Y Amour Masqué était dans son sujet même, dans ce qu'une telle conception pouvait présenter d'artificiel. M. Vaudoyer, l'ayant compris, a voulu traiter une aventure qui n'ait que de l'humanité, il a choisi la plus banale, la plus nue, l'histoire de deux jeunes gens qui s'aiment et à qui d'étroites conventions mondaines défendent de s'unir, et il en a extrait tout ce qu'une sembla- ble anecdote peut contenir en même temps de plus particulier et de plus général. L'original, ici, c'est que nul romantisme, nulle déclamation n'entachent la pureté de ce poignant récit. Ces jeunes amoureux ne considèrent pas les raisons qui leur défendent le bonheur comme de stupides préjugés et ne sont en aucune manière révoltés contre la Société. Ils obéissent à ses dures lois en les déplorant, ils souffrent et voilà tout... Je songe au Jérôme de la Porte Étroite, qui accepte avec déses- poir les impitoyables épreuves auxquelles le soumet la douloureuse Alissa, je songe à l'André Mauval de la Flambée, qui refoule si discrètement son chagrin quand sa capricieuse maîtresse rompt avec lui et qui n'arme aucun revolver. Le

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