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��340 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

qu'à son prochain retour : il réparait les harnais, visitait tous les boulons de son wagon ; quand c'était nécessaire, il donnait au véhicule une fraîche couche de peinture et repassait avec soin le nom du wagon: " M y Jessie ".

Le matin arrivait où il lui fallait harnacher les chevaux, embrasser sa femme et la petite : puis, monté sur son cheval noir, il appelait chaque bête par son nom et quand toutes les chaînes étaient tendues, il criait " Get up " et, sans à-coup, les roues démarraient. Son lourd fouet à deux mains donnait trois salves d'adieu ; quelques minutes après il avait disparu avec son attelage derrière les arbres de la crique.

La mère et l'enfant reprenaient leur vie solitaire ; le village le plus proche était à 30 miles ; les fermes et les stations étaient, dans ce district, éloignées les unes des autres. De temps à autre des bergers passaient, poussant devant eux leurs troupeaux ; des charretiers arrêtaient leurs attelages pour faire un brin de causette ; des " swagmen " (chemineaux) venaient demander du thé, du sucre et de la farine. La mère n'était pas d'une constitution très solide : un hiver, en rentrant, Jones la trouva au lit ; Jessie la soignait et s'occupait du ménage depuis une semaine. La malade dut bientôt être menée à l'hôpital le plus proche — à 40 miles de la ferme. — Mais on ne put rien faire pour la sauver et après quelques semaines, sans souffrance, elle passa " la Grande Barrière ".

Jones seul avec la petite, ne voulut point rester sur la ferme : il vendit son terrain, les vaches et les quelques meubles qui étaient dans la maison. Il renouvela son campement, acheta une tente pour Jessie, ainsi qu'un poney et une selle d'homme.

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