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LUCIEN JEAN 41

plissait avec une loyauté parfaite. Les vingt années qu'il passa dans les bureaux de la Ville, où il tint la fonction de piqueur municipal, furent vingt années de labeur opiniâtre, qu'il avait volontaire- ment doublé, pour augmenter la sécurité des siens, d'un travail qui occupait la plupart de ses veilles.

Ses collègues avaient pour lui une amitié très profonde et très délicate. Il était simple ; il était bon ; il était juste. Ceux qui vivaient avec lui reconnaissaient sans effort ces qualités qu'il possé- dait à un degré presque surhumain. Auprès de lui, qui vivait avec eux de toute son âme, ils se découvraient meilleurs, et apaisés. Ils se sentaient reliés par lui au monde où sont établis la connais- sance des choses, et le juste jugement, et la paix. Ils suivirent sa dernière maladie avec une véritable anxiété, et quelques semaines avant sa mort, ils lui exprimèrent, dans une lettre admirable, l'ardent désir de le revoir que leur inspirait leur amitié. Ce n'est pas en vain que Lucien Jean avait aimé ses frères ; ils lui donnèrent ce jour-là le plus affectueux témoignage de leur reconnaissance.

Lucien Jean demandait au travail l'ordre fon- damental de sa vie ; mais il ne connaissait point de parfait équilibre, pour lui-même, sans le secours de l'Esprit, par la connaissance et l'art. Dès sa jeunesse, il avait cherché seul le complément de sa culture chez les artistes et chez les philosophes. Un sens très sûr de l'harmonie intellectuelle le

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