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Page:Nansen - À travers le Grönland, trad Rabot, 1893.djvu/366

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a travers le grönland.

est au contraire bon pêcheur et adroit chasseur de renne. Joël est loin d’être intelligent, et s’il faut en croire les mauvaises langues, sa probité laisserait à désirer.

La gravure de la page précédente représente ce personnage et sa femme, une commère aussi insouciante que son mari.

Dans l’après-midi, nous arrivons à l’entrée de l’Ameralikfjord, où nous sommes arrêtés par un vent contraire. Nous installons le campement, et après être restés plusieurs heures exposés au froid, nous avons la satisfaction de nous trouver tous réunis dans la lente bien au chaud. La théière fait entendre son murmure joyeux : cela nous donne l’illusion d’une soirée en famille. Nous soupons et passons la soirée à fumer et à causer.

Le lendemain, le vent nous étant toujours contraire, nous allons chasser le lagopède.

Le 25, le temps s’améliore heureusement, et nous pouvons poursuivre notre route. Le soir, ce fut toute une affaire pour camper. Joël nous promena longtemps avant de trouver un endroit propice pour dresser la tente. Nous étions furieux contre lui. L’emplacement où finalement nous nous établissons était excellent : il y avait de l’eau tout près de nous, une belle grève pour tirer au sec les embarcations ; seulement si Joël nous y avait conduits du premier coup !

Nous passâmes neuf jours dans celle localité, à chasser tantôt le renne, tantôt les lagopèdes ou à faire des parties en kayak. Après ce séjour, nous allâmes nous établir à Iterdlak.

La relation de cette excursion cynégétique serait longue et monotone. Pour donner au lecteur une idée de notre existence pendant cette promenade, je me bornerai à reproduire plusieurs passages de mon journal :

27 novembre. — Le soleil a déjà paru, lorsque Joël et moi arrivons dans une petite baie située à l’ouest du campement. Nous halons à terre nos kayaks, prenons nos ski et remontons une vallée. Nous allons aujourd’hui à la chasse au renne. A peu de distance du rivage, nous trouvons les traces de deux rennes qui ont évidemment passé là hier. Nous suivons la piste en examinant soigneusement les environs, mais rien ne paraît.