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Page:Nantel - À la hache, 1932.djvu/58

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À LA HACHE

grasse. Il a cependant oublié son plus chaud rayon… là-bas… sur le lac… la robe rose, se confondant peu à peu avec le soir qui monte…

***

La nouvelle du forgeron, lancée dans cette vie neuve de jeune fille, empêche Ernestine de s’endormir. Une nuit calme entre par la fenêtre ouverte de sa chambre blanche.

Couchée sur le dos, en léger peignoir, l’enfant admire les profondeurs du ciel, essayant de s’expliquer le sentiment inconnu, surgi de son être comme une source nouvelle.

— Je le verrai… Son père dit qu’il est beau… Un homme touche-t-il à une femme ?… Est-ce que les garçons embrassent, comme ma mére a le fait ?… Ça sera t’y à moé de lui dire que je l’aime ?… Poupa dit qu’on doit s’marier pour avoir des p’tits… M’aidera-t-il à en trouver ?… Jouera-t-il avec moé et avec mes chiens ?…

Autant d’énormes problèmes, incompréhensibles pour son cœur pur. À chaque étoile la fillette a posé une question, mais les mouches du ciel restent muettes.

De guerre lasse, ne sachant quel instinct la trouble, l’amoureuse primitive se lève, endosse un manteau et s’achemine vers la grève.