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Page:Neulliès - Tante Gertrude, 1919.djvu/41

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TANTE GERTRUDE

bitation. C’était là que Mlle Gertrude était venue soigner son frère, lors de sa dernière maladie ; c’était dans une de ces petites chambres modestes, presque pauvres qu’il était mort. Et comme dans son testament il défendait formellement de pénétrer dans le château, dont son homme d’affaires avait seul la clef, la sœur et la nièce ne se doutaient guère des trésors qu’il renfermait.

Paulette avait poussé plus d’un cri d’admiration à la vue de ces appartements magnifiques, et elle était restée presque en extase sur le seuil d’une chambre encore plus luxueuse que les autres, avec ses murs tendus de satin rose, ses fenêtres élégamment drapées de riches tentures… Sur la cheminée de marbre blanc, un buste de femme se dressait sur un socle de velours et de chaque côté, dans un cadre d’or orné de pierreries, se trouvaient deux portraits d’enfants : une fillette au visage d’une idéale beauté et un jeune garçon à l’air plutôt rêveur.

— Oh ! tante Gertrude, regardez ! s’écria Paule toute surprise, c’est mon portrait. Mais l’autre… n’est-ce pas Jean de Ponthieu ?

La vieille fille tressaillit… Elle comprit soudain le rêve de son frère, son testament original… C’était sans doute la chambre qu’il avait destinée à la future comtesse de Ponthieu… Elle regarda Mme Wanel de ses yeux perçants : celle-ci n’avait rien deviné, rien senti.

— Oui, ce doit être Jean de Ponthieu, dit-elle d’un ton indifférent. Ne te le rappelles-tu pas ?

— Oh ! guère ! répondit Paulette, déjà occupée à examiner autre chose.

Mlle Gertrude attacha sur sa nièce un regard étrange, tandis qu’un sourire énigmatique se jouait sur ses lèvres minces.

— Il n’était pas bien beau, continua la vieille fille et, certes, s’il n’a pas changé, ce n’est pas un joli godelureau comme le neveu que tu vas me donner bientôt. Mais à propos, quand te maries-tu ?

— Nous ne savons pas encore. Oh ! nous avons le temps ! Nous voudrions que la cérémonie fût tout à fait grandiose, qu’on en parlât longtemps