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Page:Nichault - Anatole.djvu/178

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pris, et rien ne prouve qu’elle soit destinée à la marquise.

— Quoi, s’écria la comtesse, transportée de fureur, le nom de la marquise de Saverny, n’est-il pas sur l’adresse ; et ne lisez-vous point celui de Valentine ?

— Belle preuve ! chacun en peut écrire autant à la femme qu’il veut calomnier ou compromettre, D’ailleurs, si cette lettre était connue de la marquise, comment se trouverait elle entre vos mains ?

Ici madame de Nangis resta interdite, son front se couvrit de rougeur ; mais tout à coup, bravant la honte par la colère, elle arracha la lettre des mains du comte, et dit :

— Puisque votre misérable amour préfère m’outrager par le plus odieux soupçon que d’en croire l’évidence, je saurai bien vous convaincre sans m’abaisser à me justifier. Mais si je me livre à tout l’excès de mon indignation, n’accusez que vous des malheurs qui en seront la suite. Le ciel m’est témoin que d’aussi barbares sentiments n’ont jamais possédé mon âme ; je vous les dois tous et vous en subirez l’effet. J’ai appris de vous comment on peut joindre la perfidie à l’insulte ; vous apprendrez de moi comment on se venge du mépris.

En finissant ces mots, la comtesse sortit avec précipitation de la chambre ; et, défendant au comte de la suivre, elle alla s’enfermer dans son cabinet.