Aller au contenu

Page:Nichault - Anatole.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quand j’appris que c’était pour vous que mon ami venait de risquer sa vie, et peut-être celle de sa mère, je vous en demande pardon, Valentine, je me fis le reproche de lui avoir peint trop fidèlement le plaisir que j’avais eu à vous rencontrer et celui que je trouvais chaque jour à découvrir autant de sensibilité que de modestie dans une femme que son esprit et sa beauté auraient pu rendre vaine. Je me reprochai surtout de lui avoir dit qu’il existait entre vous et la duchesse de Linarès une ressemblance qui me rappelait sa mère à votre âge ; car, à dater de ce moment, il ne chercha plus qu’une occasion de vous voir. Le hasard la lui fournit bientôt, et j’ai su qu’il avait déjà joui plusieurs fois du plaisir de vous admirer avant d’avoir eu le bonheur de vous secourir.

» La joie qu’il ressentait de vous avoir peut-être sauvé la vie approchait du délire ; je tentai vainement de lui persuader que sa blessure exigeait le plus parfait repos : il voulut être transporté sur-le-champ à Merville, pour mieux cacher les suites de cet événement ; et, après m’avoir déclaré que son existence entière tenait au secret qu’il voulait garder auprès de vous, il défendit à ses gens de dire un mot de ce qui lui était arrivé à la sortie de l’Opéra. Le chirurgien reçut la même recommandation, et je le décidai à nous suivre à Merville, pour y soigner Anatole jusqu’à son parfait rétablissement. Ce voyage ne parut pas augmenter les souffrances du malade, ou du moins il n’osa point s’en plaindre. Pour ob-