Aller au contenu

Page:Nichault - Anatole.djvu/47

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Cela ressemble pourtant assez à la province.

— C’est possible, mais à la campagne on n’a aucune idée de cette manière de vivre, et vous savez que j’y passais l’année entière.

— Sans vous ennuyer ? Voilà qui est miraculeux. Je n’ai jamais pu rester plus de trois mois dans mes terres, malgré le soin que je prenais d’y amener beaucoup de monde ; je frémis déjà de l’idée d’y aller ce printemps ; et, sans le projet que nous avons d’y jouer la comédie, j’aurais bien de la peine à tenir la promesse que j’ai faite à votre frère de l’y accompagner.

— Si vous lui disiez à quel point cela vous contrarie, je suis sûre qu’il ne l’exigerait pas.

— Ah ! vous le connaissez bien peu, si vous ne savez pas quelle importance il attache à ma présence au château de Varenne, à l’époque de la fête du village. Ne faut-il pas que je sois le témoin de cette grande solennité, et que je prenne ma part des honneurs qu’on lui rend. J’avoue que je la lui céderais de bon cœur, car je ne connais rien de si fastidieux que cette parodie des fêtes de souverains où l’on se fait rendre une partie de l’encens qu’on dépense à la cour.

Ici la portière s’ouvrit, et ces dames descendirent à l’Opéra. Madame de Nangis, qui ne se souciait pas d’être vue dans sa loge, entra dans celle de la princesse de L…, tourna le dos au théâtre, et se mit à chercher des yeux auprès de quelle jolie femme le chevalier d’Émerange tentait de se venger d’elle.