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Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/153

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Ce trait me donne une bien mauvaise opinion de lui, et je ne crois pas le lui pardonner de ma vie.

D’après cette scène j’étais disposée à me faire des chagrins de tout. Emma se trouva près de moi, je lui reprochai d’avoir dit à son ami une chose désagréable, elle s’en repentit et fut pour l’embrasser ; mais sir James la repoussa, sortit brusquement de la chambre, et la pauvre enfant désolée d’un accueil aussi extraordinaire, vint se jeter en pleurant dans mes bras. Ses larmes firent couler les miennes ; je sentis combien l’action de sir James devait l’affliger : c’est la première fois, me disais-je, que ses caresses sont repoussées ! Et il faut plus que de l’insensibilité pour traiter aussi durement cette bonne petite. S’il croyait nécessaire de la punir de l’espèce d’injure qu’elle lui avait dite, au moins aurait-il dû m’épargner ! Il n’ignore pas la peine que ressent une mère du moindre chagrin qu’on fait à son enfant, et je suis certaine qu’il a voulu m’outrager.

Oppressée par cette cruelle idée, j’ai pris Emma pour la mener coucher, profitant de cette occasion pour rentrer dans mon appartement et m’y livrer aux tristes pensées qui remplissaient mon cœur. Je repassai tout ce qui m’était arrivé dans la journée, et je trouvai qu’excepté de Lucie j’avais éprouvé de tout le monde une chose désagréable ; ma fille elle-même m’avait affligée par son mot à sir James, je n’étais pas