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Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/297

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traits quand j’eus frappé son sein !… À peine suis-je revenu de cette effroyable impression, qu’on m’apprend le malheur de Frédéric ; je vole à son secours. Vous arrivez presque aussitôt auprès de lui, et c’est devant moi que vous écoutez les expressions de son amour, que vous semblez craindre de l’interrompre. J’en crois savoir assez, je veux vous fuir, mais puis-je te quitter sans aller pleurer dans ces mêmes lieux où je t’ai vue sensible à ma douleur ! Je m’échappe, bientôt j’entends le son de ta voix. Je m’arrête, et crains de me tromper. Tu m’appelles ingrat. Ce nom m’apprend mon injustice et mon bonheur. Ah ! Laure ! cesse de plaindre ton amant, cet instant acquitte le sort envers lui, tu l’aimes, il a senti ton cœur battre contre le sien : la raison, le devoir se réunissent pour l’arracher de tes bras… Toi seule te donnes à lui ; et s’il te perd, c’est pour t’aimer trop tendrement !… Oh ! moment d’ivresse et de douleur ! pourquoi n’ai-je pas succombé à tant de félicité ?… Tu ignorerais encore le fatal secret qui nous sépare ; et je serais descendu dans la tombe en emportant tes regrets et ton amour ! À présent, que vais-je devenir ? irai-je traîner loin de toi des jours de tristesse et de honte ? Me laisseras-tu fuir accablé de ta haine ?… Non, non, la pitié, peut-être encore l’amour, t’engageront à pardonner un malheureux coupable. Tu pleureras sur la fatalité qui le condamne à renoncer à toi… Il pourrait me