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Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/165

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va la conduire jusqu’à sa voiture, Albéric n’a plus aucun moyen de lui apprendre ce qu’il éprouve, l’ivresse où l’a plongé le peu de mots qu’elle lui a dits, l’impression qu’il conservera éternellement du regard qui les accompagnait ; enfin, dans cet instant cruel, il donnerait jusqu’à son espérance pour retrouver le peu de moments qu’il vient de laisser échapper sans lui parler de son amour. Il sait trop que loin de lui tout conspire contre le triomphe de cet amour, dont il voulait douter lui-même ; il prévoit tout ce que la perfide prudence des gens qui l’accusent de méchanceté va tenter pour détruire sa faible puissance sur le cœur de Mathilde ; et son esprit, si adroit à se préserver des piéges qu’on lui tend, ne sait comment la prévenir du mal qu’on veut leur faire à tous deux. Il a donné tant d’armes contre lui quand il n’aimait qu’à combattre, que le jour où il se sent vaincu, il doit être accablé.

Tout entier à ces réflexions pénibles, il était parvenu presque involontairement dans le vestibule, et se disposait à quitter une fête que le départ de madame de Lisieux allait rendre déserte pour lui, lorsque mesdames de Cérolle, suivies de M. Ribet, vinrent le réclamer pour entendre chanter les nouvelles romances de M. B…

— Elles sont ravissantes, disaient ces dames, et vous ne pouvez vous refuser à les entendre. D’ailleurs, madame la baronne du Renel a cent choses à vous dire.

— C’est trop de séductions à la fois, répondit Al-