Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/247

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du passage de nos troupes dans ces contrées de glace ?

— Il est certain que je pourrais vous y conduire les yeux fermés, et que je sais par cœur les endroits où l’autre s’est arrêté ; pourtant je n’étais pas avec lui lorsqu’il a pensé se précipiter, avec son cheval, à cent toises au-dessous du chemin, dans le torrent de la Drance ; c’est un guide de Liddes qui l’a retenu au moment où son cheval l’entraînait. Cet homme vit encore de la pension qu’il a si bien gagnée ; mais, ce que vous aurez peine à croire, madame, c’est que, malgré tout ce que lui a dit le petit caporal pour l’engager à venir à Paris lui demander la récompense du service qu’il lui avait rendu, jamais l’entêté montagnard n’a voulu quitter ce village de planches de sapin, qui est inondé tous les hivers, et qu’il appelle sa patrie.

— Sans doute il y était aimé, pensa Mathilde.

Et elle s’avança vers la porte de l’église en faisant signe au soldat de la suivre. Avant de rentrer dans la salle, elle lui demanda s’il consentirait à les accompagner jusqu’à Martigny.

— Très-volontiers, madame, répondit-il ; vous m’avez l’air d’une bonne Française, et je vous raconterai en chemin autant de batailles que vous en voudrez entendre. Dame ! c’était le bon temps alors ! on ne risquait pas de mourir de maladie !

En finissant ces mots, le soldat salua Mathilde, et